Le Christ au sourire…
Je ne sais pas bien pourquoi ce sourire… il s’est dessiné. Je savais qu’il devait être là. Et si je regarde, je vois de la douceur mais surtout cet élan, cette béatitude, regard intensément posé sur l’invisible. Il sait, Jésus, que la Vie est devant, et monte un sourire d’enfant sur son visage d’homme Dieu. Ça me parle : Vrai homme, il redevient enfin totalement Enfant du Père, il revient enfin à Lui-même, Dieu né de Dieu qui revient à Dieu…
Dans ses mains, sur ses pieds, des étoiles. Sur son torse, une mince ligne d’or. Portes ouvertes sur sa divinité. « Par ses blessures nous sommes guéris ». Ses plaies si souvent associées à la torture et au sang versé matériellement, sont en fait les failles par lesquelles se déverse l’invisible Amour, la présence même de Dieu.
L’or l’a écrit en étoiles…
Je regarde.
Les anges d’abord. Vibrants et mouvants, les Séraphins ouvrent l’espace où l’humble Agneau tient le Livre… il y est écrit « le jour de Dieu… » Aujourd’hui. Aujourd’hui le sourire, le dévoilement, aujourd’hui enfin, le temps vient de la Présence. Le jour de Dieu à chaque instant ? Je ne sais pas. Je ne sais pas de quoi ça me parle, c’est comme une brusque résonnance. Ces quatre mots sont en moi comme gong…
Aux branches de la Croix, deux anges en adoration, tout centrés en eux-mêmes, les yeux baissés. Ils ont les seuls à baisser les yeux. Pudiques et humbles. Ils savent, eux, l’inaccessible. Le Corps du Christ. Ils savent. Ils attendent peut-être. Ils ne regardent pas. L’extase de la Résurrection est entre Dieu et Dieu, et les anges qui sont les plus proches baissent les yeux et se taisent.
Marie et Jean sont plus bas, ils ne voient pas l’extase divine, ils disent, eux, « regardez ! Il est vivant, regardez ! Ses bras sont grands ouverts, nous l’avons vu ressuscité, venez ! » Ils sont à mi-chemin du ciel, encore un peu de la terre, et ils appellent parce qu’ils lisent dans le sourire toute la tendresse du Père, la profondeur de sa compassion et l’infini de sa miséricorde.
Tout en bas, les yeux fixés sur le Christ, il y a une autre Marie. Marie des Anges. On l’a dit bienheureuse. Tout ce qu’on voit d’elle, c’est un regard ardent et interrogateur. Une prière instante. Si bas et toute tendue vers le Christ… Elle n’est qu’une supplication, elle appelle, le Christ est toute sa vie, c’est certain. Elle n’en a pas d’autre, mais elle est si loin… Elle ne voit pas l’Esprit qui l’effleure, elle ne voit pas la branche souple qui s’échappe de sa main vers le ciel, elle ne voit pas la claire lumière qui la baigne. Marie des Anges porte en elle l’aspiration de toute l’humanité.
Elle porte en elle la plainte des âmes…
Le Christ au sourire a pris sa place dans l’oratoire. Il a ouvert les bras pour tous ceux qui passent cette porte, et l’on entend sa voix :
« Venez à moi, vous tous qui ployez sous le fardeau… »